Dans cette partie, nous parlerons de compétences, des états du moi et du cycle de la Dépendance.

L’autonomie d’une personne se construit dans sa relation à une autre personne. Elle se coconstruit, chacune des parties souhaitant négocier dans sa relation à l’autre, la juste marge de liberté qui lui est nécessaire pour bien fonctionner. L’autonomie d’une équipe vis à vis de son manager relève du même principe.

Le point de départ est la prise de conscience des liens de dépendance de la personne avec l’autre, son manager par exemple (ou d’une équipe avec son manager). La gestion de ces liens de dépendance est au cœur du processus d’autonomisation relationnelle.
La recherche de l’autonomie conduit à la fois :
● A rechercher plus de liberté : un pouvoir accru de décision, la délégation de nouvelles activités, la maîtrise de compétences supplémentaires, le développement de capacités de négociations ….
● Et à se détacher des liens de dépendance qui freinent l’autonomisation : suppression des liens de soumission arbitraire et affirmation de l’identité.

Les différents niveaux d’autonomie s’appuient sur les concepts de l’Analyse Transactionnelle, en particulier :
● Les 3 états du MOI : l’Enfant (de naissance) – le Parent (acquis par l’éducation) et l’Adulte (ce qu’on tend à devenir).
● Dans le cadre d’une relation à 2, chaque personne adopte un état du moi, en lien direct avec celui de l’autre personne.
Si l’une adopte l’état de « Parent », l’autre prendra l’état d' »Enfant ». Le positionnement de l’une en « Adulte » permet le positionnement de l’autre en « Adulte ». Explorons ensemble les moyens d’y parvenir.

Les travaux de Nola Katherine Symor montrent que l’autonomie suit le « cycle de la dépendance ». Toute personne cherchant à sortir de l’état de dépendance passe successivement par chacune des quatre « phases » décrites par les illustrations ci-après et commentaires correspondants.

Selon Francis Boyer *, le modèle des Etats du Moi permet aux entreprises de prendre conscience que les principes du management traditionnel ont positionné les managers dans une posture de « Parent » et les collaborateurs dans une posture d’ »Enfant » et prendre conscience de la nécessité de faire évoluer les managers et les collaborateurs vers une posture d’ »Adulte » pour développer la coresponsabilité.

La personne est soumise à une autre personne dans une relation de type dominant / dominé. (parent /enfant). Elle s’identifie à l’autre et n’est en rien autonome.

Exemple : prise d’un nouveau poste pour un individu. Elle n’a pas les informations ou les compétences suffisantes et ne peut donc pas prendre de décision.

NB : Il en va de même pour une nouvelle équipe prenant la suite d’une autre sur un sujet donné.

Si cette étape se prolonge alors la personne reste dans une posture de soumission non appropriée.

La personne rejette l’oppression de la phase de dépendance. Elle s’oppose de manière plus ou moins violente et constructive dans un processus de séparation. Elle a besoin de se démarquer, de s’opposer et de faire sa propre expérience du réel.

L’expression des désaccords, tout à fait centrale à cette étape, peut être verbale ou non verbale, d’où la nécessité de savoir décoder.

Plus la dépendance a été forte, plus la contre-dépendance risque d’être forte.

Le risque à ce stade est que la personne s’enferme dans l’opposition, comme un adolescent révolté, rendant  l’autre (client, chef, …) responsable de sa propre passivité.

La logique est la même pour une équipe.

La personne n’est plus conditionnée par une autre personne, elle se prend en charge entièrement, elle explore ses valeurs, et alternatives.

Elle prend conscience de ses racines culturelles, de ce qui la différencie des autres. Cette étape caractérise une personne compétente, capable d’affirmer ses convictions, ses orientations.

Le risque est qu’elle se centre trop sur elle-même et sa propre loi, se considère comme le centre du monde, ne veuille plus rendre de comptes, et refuse l’intervention de l’autre.

La logique est la même pour une équipe.

La personne s’ouvre à son environnement, tisse des liens avec l’extérieur. Elle peut penser et agir avec d’autres sur des sujets communs ou non. Elle s’est suffisamment décentrée d’elle-même pour être en relation réelle et sincère avec l’autre sans perdre sa propre identité. Elle considère l’autre comme complémentaire, comme un facteur de réussite.

Si l’un des deux acteurs de la relation n’est pas lui-même en interdépendance dans son environnement, alors il ne peut pas favoriser la prise d’autonomie de l’autre, partenaire ou collaborateur par exemple.

Chaque système, personne ou équipe, gère en parallèle différentes relations. Un système autonome est celui qui est à l’aise dans les quatre niveaux d’autonomie en parallèle sur des relations distinctes.

Un exemple pour l’illustrer :
le Directeur Financier d’une filiale est en dépendance du Directeur Financier Groupe pour la définition de la stratégie financière.
Il est contre-dépendant du Directeur Général de la filiale qui veut s’immiscer dans le management de son équipe.
Il est indépendant sur l’organisation de son service
et il est interdépendant avec ses collègues du Codir pour déployer le nouveau système qualité au sein de l’entreprise.

Chaque passage d’un niveau de dépendance au suivant comporte un processus de deuil.

A titre d’exemple, une personne qui passe du niveau 0 (dépendance) au niveau 1 (contre dépendance) va perdre le confort de la prise en charge par son manager.
A contrario, elle va gagner la permission de dire « Non » et de s’affirmer.

A chaque étape, s’ajoute l’appréhension de l’inconnu que constitue l’étape suivante, avec un degré différent d’une personne à l’autre.

Pour terminer, le sens a un effet facilitateur dans la gestion de la courbe de deuil, comme l’explique Vincent Lenhardt :

« Le sens donne des valeurs et des objectifs qui permettent de compenser la frustration liée au phénomène de deuil et de compenser la peur de l’inconnu que représente l’étape suivante.
Quel que soit le niveau de la personne, elle peut se sentir plus libre et plus autonome car sa situation est pleine de sens pour elle, lui permettant de ne pas s’identifier à cette situation relationnelle mais trouvant un sens profond à sa vie, et de donner à son vécu un regard qui la transcende. »

Comment créer de l’autonomie dans ses relations ?
Comprendre intellectuellement le cycle de la dépendance et ses 4 stades est une 1ere étape. Mais cela ne suffit pas …
● S’approprier le concept en l’expérimentant dans sa relation à son manager, un pair ou un collaborateur est une bonne piste pour commencer, très efficace aussi avec l’un de ses enfants ou son conjoint 😉.
● L’étape suivante peut être l’occasion de se questionner avec cette personne, sur la phase dans laquelle chacun estime se trouver vis-à-vis de l’autre dans un contexte donné. Faire le point sur ce qui fonctionne bien et ce qui fonctionne moins bien puis décider ensemble des évolutions souhaitées dans la relation.

Cet article s’appuie sur les travaux de Vincent Lenhardt, co-fondateur de l’institut français d’analyse transactionnelle, et son ouvrage « Les responsables porteurs de sens », de Stéphanie Desfontaines et Stéphane Montier et leur livre « les clés de l’autonomie Modèle et processus d’accompagnement » et de Nola Katherine Symor, « le cycle de la dépendance ».

Dans le prochain article, nous aborderons l’autonomie dans l’action.

* Pour aller plus loin : https://www.innovationmanageriale.com/responsabilisation-autonomie/seul-la-relation-adulte-adulte-permet-de-developper-la-coresponsabilite/

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